Délit de « sale gueule » et chiens bonnes bouilles

Dans bon nombre de bandes dessinées et dessins animés, nous observons des discriminations dérangeantes : les jolies blondes fines sont écervelées, les femmes avec des formes et les hommes chauves sont systématiquement méchants. Réducteur et sans fondement ? Je suis bien d’accord avec vous, et pourtant, dans le monde du chien, nous vivons entourés de clichés.

Le « délit de sale gueule » : la diabolisation de certaines races sur des critères physiques

Vous avez probablement entendu parler de “délit de sale gueule”. Les clichés peuvent avoir la dent dure : sous prétexte d’un physique inquiétant ou impressionnant, on entend parler de chiens “imprévisibles”, qui deviennent fous, ou qui veulent dominer le monde. On ne peut pas le nier : les personnes qui se promènent avec un chien impressionnant se heurtent souvent à de nombreuses réflexions désobligeantes, uniquement liées au physique de leur chien. Entre les personnes qui changent de trottoir, les autres qui demandent à ce que le chien soit muselé (même lorsqu’il ne s’agit pas d’un chien catégorisé) ou encore les autres “propriétaires” qui refusent de laisser les chiens se rencontrer sous prétexte que l’autre “est dangereux” ou “fait peur”, le quotidien ne doit pas être simple. 

Le cliché du « chien bonne bouille » : quand le respect de l’individu passe à la trappe

Mais aujourd’hui, je souhaiterais vous parler d’un autre cliché, qui pose autant problème mais dont on parle moins : le cliché du chien “bonne bouille”. Vous voyez, ces chiens poilus, avec un visage rond, des petites oreilles dressées ou de belles oreilles tombantes ? Ces chiens qui ont la côte, appréciés du plus grand nombre et qui sont vus comme de grosses peluches. Ce chien qui, soit-disant, adore les enfants, rêve que tout le monde le manipule en permanence, et est gentil avec tout le monde… On retrouve dans ces “gentils chiens” de nombreuses races populaires, comme le labrador et le golden, le berger australien, le samoyède…

Les difficultés que posent ces deux clichés

Ces deux clichés comportent chacun des avantages et inconvénients. Le chien “sale gueule” ne va pas se faire trop tripoter par des inconnus et des enfants à longueur de journée, mais sa socialisation peut être plus compliquée du fait des réactions des personnes en face. Sans parler de la pression sociale ressentie par leurs humains. Du côté des chiens “bonnes bouilles”, leurs “propriétaires” font généralement face à moins de réflexions et de pression de la part des autres usagers. En revanche, les caresses non consenties et les câlins par des inconnus sont indissociables ou presque du quotidien de ces chiens. S’ils ont plus facilement accès aux contacts sociaux avec leurs congénères, ils ont également droit aux chiens jetés dans leur direction, sous prétexte que “cette race de chiens est gentille”. Combien de fois des personnes ont détaché leur chien en direction de mes chiens attachés (ou lancé délibérément la balle dans ma direction) afin d’initier un contact entre chiens, sans même me demander si j’étais d’accord avec ce contact… Le tout accompagné d’une phrase merveilleuse : “ah c’est super sociable le berger australien, mon jeune chien a très envie de jouer aussi”. Je ne sais pas ce qui peut faire penser que Neska est joueuse, je cherche encore. Ah, si. C’est un berger australien. 

Neska, victime du cliché « bonne bouille »

J’ai moi-même deux chiens “bonne bouille”. Pour Neska, les gens traversaient le parc en courant lorsqu’elle était petite pour venir la caresser et lui faire des câlins sans demander la permission ni à ma chienne, principale concernée, ni à moi. A 1 an, Neska était devenue fâchée sur les inconnus à force de se faire envahir. Lorsque j’expliquais donc aux inconnus que ma chienne ne voulait pas se faire toucher car elle était mal à l’aise, leurs réponses me blessaient : “ah elle a dû être battue, vous ne l’avez pas eu chiot ?”. Comme si la violence physique était la cause de toute inquiétude. Non, ma chienne n’a pas été maltraitée, simplement elle n’a pas été respectée dans ses interactions avec les humains. “Oh c’est bizarre, normalement c’est sociable le berger australien !” Comme il est réducteur de limiter la personnalité d’un chien à sa race ! 

Bien qu’il puisse y avoir en effet des tendances comportementales au sein d’une race, il est indispensable de prendre également en compte l’individu en lui-même avant de classer un chien comme “gentil” ou “dangereux”. Chaque chien devrait avoir droit à la même considération et au même respect, qu’il s’agisse d’un rottweiler, d’un golden retriever ou d’un chihuahua. 

Vers un plus grand respect de l’individu chien, de sa communication et de ses limites

Malheureusement, ces clichés sont assez représentatifs de la vision du chien dans notre société (notamment au sein des “moldus”, c’est à dire ceux qui n’ont pas de chien). L’animal est réduit à l’état de peluche : il est normal qu’il tolère tout des inconnus, ne doit jamais être en désaccord, et ne doit surtout pas faire peur, au risque d’être mis au ban de la société. Heureusement, les consciences s’éveillent progressivement pour laisser plus de place à l’individu chien, et lui laisser plus d’opportunités de s’exprimer, et d’accepter ou non certaines situations qui le dérangent.

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